Inconnu il y a encore quelques années, le « revenge porn » ou « vengeance pornographique », dont a été victime Benjamin Griveaux, consiste à diffuser des images intimes sans l’accord des personnes concernées, et est désormais sévèrement puni par la loi.
Qu’est-ce que le « revenge porn »?
Le phénomène consacré par l’expression « revenge porn » en anglais, appelé pornodivulgation ou vengeance pornographique en français, consiste à mettre en ligne des photos ou vidéos intimes sans le consentement des personnes concernées.
Un exemple type est l’échange dans l’intimité d’un couple de photos ou vidéos à caractère sexuel. Lors d’un conflit ou après la rupture, l’un des membres du couple diffuse ce contenu par esprit de vengeance, à des proches ou sur les réseaux sociaux. Cela peut s’accompagner de chantage ou de relations sexuelles contraintes.
Que les images aient été prises par la personne ou avec son autorisation importe peu: c’est désormais leur diffusion qui est punie. Les peines sont aggravées si les images montrent des mineurs.
Les cas se sont multipliés avec l’explosion des réseaux sociaux, indique maître Avi Bitton, avocat en droit pénal.
Souvent précédée de menaces ou de chantage, la publication d’images intimes « est souvent une mesure de rétorsion, après qu’un des membres du couple se soit senti maltraité », indique Justine Atlan, directrice de l’association e-Enfance.
« Ce comportement est assez répandu chez les jeunes, qui ont intégré le numérique dans leurs rapports affectifs et sexuels », souligne Justine Atlan. « Le smartphone est un outil très intime, et a en même temps une capacité de médiatisation très forte. Il peut pousser à une réaction de vengeance très impulsive ».
Que risquent ceux qui diffusent?
Depuis 2016 et l’adoption de la loi « pour une République numérique », la diffusion de « revenge porn » est passible de 2 ans d’emprisonnement et 60.000 euros d’amende.
Dans la loi qui les pénalise, les vengeances pornographiques sont définies comme « le fait de transmettre ou diffuser, sans le consentement de celle-ci, l’image ou la voix d’une personne, quand l’enregistrement, l’image ou la vidéo sont sexuellement explicites ».
La loi prévoit donc de punir par les mêmes peines tous ceux qui diffusent ces images, même par une simple republication sur les réseaux sociaux.
« Le consentement est au centre de la loi: ce que j’ai accepté dans la sphère privée ne vaut pas pour la sphère publique », souligne Justine Atlan.
Quelles conséquences pour les victimes?
Souvent adolescentes, elles sont ostracisées, cyberharcelées et parfois poussées au suicide.
Que prévoit la loi à l’étranger?
De nombreux pays ont renforcé leur législation ces dernières années pour protéger les victimes de pornodivulgation, alors que les cas se multipliaient.
– Le délit de « revenge porn » est passible en Italie d’une peine pouvant aller de un à six ans de réclusion, et de 5.000 à 15.000 euros d’amende.
– Un tribunal londonien a condamné en 2018 un ex-analyste financier de la City à 16 semaines de prison pour avoir publié sur des sites pornographiques des photos d’une stagiaire qui l’avait éconduit.
– La pratique est aussi punie de deux ans de prison au Danemark.
Que faire si l’on est menacé?
L’association e-Enfance propose un numéro vert (0 800 200 200). Elle recommande de porter plainte, ce qui permettra à la justice de retrouver derrière leur pseudonyme ceux qui ont diffusé les images.
« Souvent, on n’a même pas besoin d’aller au tribunal », précise Avi Bitton, avocat. « On envoie une lettre d’avocat à la personne qui a diffusé les images, ou a menacé de les diffuser, et ils les retirent ».