Vivant en Côte d’Ivoire depuis sa chute en 2014, l’ancien président doit participer à une rencontre avec les anciens chefs d’État burkinabé, sous l’égide du régime de transition.
Alors que les nouvelles de l’arrivée de Blaise Compaoré au Burkina dans les prochains jours circulaient depuis lundi, Abidjan l’a confirmé officiellement mercredi 6 juillet à Ouagadougou. Vivant en Côte d’Ivoire depuis sa chute en 2014, l’ancien président doit participer à une rencontre avec les anciens chefs d’État burkinabé, sous l’égide du régime de transition, dans le cadre d’un processus de réconciliation.
Jamais depuis son renversement par une insurrection populaire en 2014, Blaise Compaoré n’a remis les pieds au Burkina. Il y a huit ans, le président déchu a été accueilli à Abidjan par Alassane Ouattara, qui lui a octroyé la nationalité ivoirienne. Ces dernières années, plusieurs délégations missionnées par l’exécutif burkinabè se sont succédé à Abidjan pour étudier les possibilités de faire revenir Blaise Compaoré dans son pays, dans le cadre de la réconciliation.
Mais le procès de l’assassinat de l’ancien leader Thomas Sankara, puis le putsch qui a renversé le président Roch Marc Christian Kaboré en janvier ont interrompu la démarche. Celle-ci a finalement été relancée par la junte.
Fin juin, le lieutenant-colonel Paul-Henri Sandaogo Damiba a dépêché l’ancien chef de l’État Jean-Baptiste Ouedraogo à Abidjan, dans une démarche qui semble donc sur le point d’aboutir, a confirmé le porte-parole du gouvernement ivoirien, Amadou Coulibaly à l’issue du Conseil des ministres ce mercredi, à notre correspondant à Abidjan, Pierre Pinto :
« À la suite des contacts que le président du Burkina, le chef de l’État qui dirige la transition, a eus avec la Côte d’Ivoire, les dispositions sont en train d’être prises afin de permettre au président Compaoré de participer au processus de réconciliation qui est engagé dans son pays. »
Son retour est une volonté politique
Mais son retour est le fruit d’une véritable volonté politique de la présidence. La requête était ancienne. Depuis des années, les partisans de Blais Compaoré demandaient le retour des exilés, afin de permettre une réconciliation nationale. Mercredi, le porte-parole du gouvernement Lionel Bilgo a annoncé la tenue d’une rencontre entre anciens chefs d’État burkinabè, dont Blaise Compaoré, d’ici la fin de semaine.
« Le président Damiba comprend que l’ensemble des Burkinabè souhaitent une réconciliation nationale pour qu’ensemble et unis, nous puissions faire face aux groupes terroristes », explique l’ex-chef de file de l’opposition et président du Congrès pour la démocratie et le progrès, le parti de l’ancien président.
Une grace présidentielle au sujet du procès Sankara ?
En avril, Blaise Compaoré a été condamné en son absence à la prison à vie, lors du procès de l’assassinat de Thomas Sankara. Les avocats de la famille Sankara ont appelé ce mercredi les autorités burkinabés à l’arrêter à sa descente de l’avion.
« Dans le cadre de la réconciliation on peut recourir à des dérogations, explique Lassané Sawadogo, secrétaire exécutif du Mouvement du peuple pour le progrès. Mais pour cela il y a des procédures à diligenter, sans quoi ce retour serait contre-productif. »
Parmi ces procédures, une grâce présidentielle. Pour Guy Hervé Kam, avocat des parties civiles dans le procès de l’assassinat de Thomas Sankara, cette solution « serait un défi à la justice », et montrerait que « le régime putschiste se sert de l’alibi terroriste pour forcer une réconciliation amnésie ».
Selon la loi donc, Blaise Compaoré devrait être arrêté dès son arrivée sur le territoire burkinabè, comme le rappelle Maître Ambroise Farama, avocat des parties civiles, ou alors cela signifierait « la faillite de notre système judiciaire »
Ces dernières années, Ouagadougou a demandé l’extradition de Blaise Compaoré. Ce que la Côte d’Ivoire a toujours refusé au motif qu’elle n’extrade pas ses ressortissants. Ce voyage de quelques jours peut donc laisser entendre que le protecteur de Blaise Compaoré a reçu des gages sur ce point de la part de Ouagadougou.